Par Mohamed Ould Khattatt (mmkhattatt@hotmail.com)
17ème partie
C’est une vérité de Monsieur Tout le Monde: toutes les choses ont une fin et la «Ma chronique parisienne» s’en va pour s’arrêter maintenant que je suis revenu chez moi dans «le pays du million de poètes», le «bilad chinguitt», «ma Mauritanie natale» où une autre réalité m’attend.
Certes, je reviens avec quelque chose de précieux, un document de l’honorable CFPJ international français attestant d’une formation en journalisme Web et donc de connaissances précieuses acquises à l’étranger qui me serviront et que je pourrais partager.
Tout comme je reviens avec des amitiés et des relations humaines d’une valeur incommensurable qui pourraient m’aider dans ma vie professionnelle et personnelle.
Mais il y a plus profond : ce quelque chose en moi que je ne saurai taire, puisqu’un vide m’entourait lorsque je m’apprêtais à rentrer au bercail. Milles et une réflexion sur l’avant et l’après séjour parisien me taraudaient.
A Paris c’était, c’est un monde pour lequel le temps est de l’argent. Un monde qui veille à ce que l’heure calculée pour telle occupation soit utilisée et remplie comme il se doit. Ce qui n’est pas le cas chez moi où quand vous donnez un rendez-vous à quelqu’un à 12H dans votre bureau, ce n’est qu’à 12H que lui, décidera d’aller de chez lui, à ce rendez-vous. Au lieu de prévoir un quart d’heure de plus pour la route, il estime que c’est à cette heure convenue de 12H qu’il doit se mettre en route pour être au rendez-vous. C’est dire que le retard est déjà dans nos comportements et c’est pourquoi nous sommes arriérés sur tous les plans.
Je quitte un pays développé où les constructions ont une histoire, une architecture, sont des symboles reflétant une civilisation sur laquelle on veille de génération en génération, même par la propreté de ce qui l’entoure : des sacs à poubelles sont partout fixés afin que les passants y jettent qui un kleenex, un paquet de cigarettes vide, un sachet, une bouteille, etc. Le Louvre en rénovation, Les Halles, des quais et des voies du métro, …
J’y réfléchissais parfois avec mes amis, Mouka surtout, Kissima, Ben et Dou aussi. Nos responsables qui voyagent depuis la nuit des temps ou plus récemment encore depuis notre indépendance en 1960 dans cette métropole, voyageaient-ils uniquement pour eux-mêmes, pour leurs yeux et donc jamais pour le pays avec un souci de s’inspirer de ce qu’ils voyaient pour développer notre capitale, nos villes ? Sinon, pourquoi, notre pays n’avance jamais ?
Je quittais donc Paris et son niveau de vie très élevé pour Nouakchott, la capitale de mon pays où la cherté de la vie suffisait à expliquer les combats quotidiens pour la survie de nos populations qui croulent sous le poids de la flambée des prix, de la faiblesse du pouvoir d’achat, de la corruption, de la gabegie, des détournements des deniers publics, malgré nos richesses naturelles intarissables.
Parmi ces souvenirs qui me restent gravés dans la mémoire, il y a aussi ce respect de l’autre, de son intimité même s’il ne fait rien pour la préserver. J’en veux pour preuve cette liberté que se donne chacun à dérouler des tranches de sa vie dans le métro comme s’il y était seul et que personne ne l’écoutait. Si près de lui pourtant, se frottant les épaules parce que le métro est surchargé. Tant pis si des bribes de conversations sont dévoilées devant l’étranger ou le parisien bien distingué qui fera semblant de ne point les entendre et ne s’en préoccupera presque jamais.
Chez nous, cela ne serait pas passé inaperçu, loin de là ! Tout aurait été perçu comme une arrogance, une folie. Plus grave tout aurait été noté dans un coin de la tête et, une fois rentrés chez eux, dans leurs cercles amicaux et familiaux, nos hommes, femmes et enfants en auraient fait le sujet de leur discussion. Non pas que cela les concerne ou les intéresse par oisiveté, désœuvrement.
Je me lève donc à 05H du matin ce samedi 30 juillet et m’empresse de faire ma prière du Sobh, puis un café au chocolat. Je sirote un peu de lait, me rassure que mon billet, mon passeport, mon passe Navigo, mon ticket RER sont bien dans la poche intérieure de ma veste. Un coup d’œil au miroir pour voir si je suis bien rasé pour éviter d’être trahi par des cheveux blancs à la barbe, me parfume, chausse mes lunettes et regarde une dernière fois le canapé convertible qui me servait de lit avant de me diriger vers la sortie. J’emprunte l’ascenseur pour atterrir au rez-de-chaussée. Je glisse la clef magnétique du studio 63 que j’occupais sous la porte du bureau d’accueil et quitte définitivement le 135, résidence Egide du Montparnasse.
Il est 6H10 du matin. En bon parisien, je traine mes valises à roulette sous une fine pluie jusqu’à la bouche du métro Vavin, arpente les escaliers, valide mon passe navigo et attends le métro qui vient dans 2 minutes. C’est parti pour les Halles où je change de correspondance pour monter dans le RER «B» à destination des aéroports Charles De Gaule.
Après plusieurs arrêts, c’est au terminal 2C que finira sa course ce RER et j’y pose mes valises alors qu’il est 6H45. L’attente sera longue avant que les guichets ne débutent l’enregistrement. Mais cette attente sera encore plus longue lorsqu’on nous annonce que notre pilote fait partie des syndicats minoritaires en grève et qu’il va falloir attendre que l’on en trouve un.
L’embarquement prévu à 09H35 ne se fera qu’à 11H20. Un temps assez suffisant pour que Kissima me téléphone et que nous échangeons des derniers salamalecs. J’appelle ma femme pour la rassurer que j’embarque. Le CFPJ est déjà un lointain souvenir.
FIN.
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