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mercredi 10 août 2011

MA CHRONIQUE PARISIENNE (16ème Partie)

Par Mohamed Ould Khattatt (mmkhattatt@hotmail.com)
16ème partie
C’est donc Ben qui rentrait le premier chez lui, au Burkina Faso à l’aube du vendredi 29 juillet. Je ressentais comme une tristesse alourdir mon cœur lorsque nous nous séparâmes 35, rue du Louvre, agitant des mains. Ben était bien habillé en T-shirt bleu et veste grise. Ses baskets du premier jour lui étaient restées fidèles ne le quittant presque jamais.

Pourtant, constant un jour que j’avais changé de chaussures, il me demandera avec son air très sérieux:
- «Koro, où est-ce que tu as acheté ces chaussures. J’espère qu’elles ne coûtent pas cher.»
- «Dans un commerce à Barbès, pour 10 Euros seulement», répondis-je.
- «Et ce sous-vêtement en col «V» blanc?, renchérit-il.
- «Celui est beaucoup moins cher, c’est à 2 Euros 99 puisque je l’ai payé à la caverne de TATI», rétorquai-je.
- «Et l’autre T-shirt à manches longues que tu portais hier?», s’empressa-t-il de demander.
- «Ah, l’autre est bien plus cher ! Ca fait dans les 19 Euros, c’est payé dans un centre commercial de la Tour Montparnasse et tu sais que là-bas, c’est cher», lui dis-je.

A la pause-déjeuner de midi-quatorze heures, il m’informe qu’il veut bien m’accompagner à Barbès où je déjeune. Mais une fois devant TATI, il me fausse compagnie. On ne se retrouvera qu’au CFPJ.
- «J’espère que tu as acheté les chaussures et les T-shirt», lui lançai-je.
- «Pas les chaussures, mais des T-shirt Laurent Gbagbo!», me clame-t-il fièrement.
- «Des T-shirt quoi ?», dis-je surpris.
- «Gbagbo !», ricane-t-il en ajoutant: «c’est avec un sous-vêtement comme celui-ci que l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo a été arrêté. Depuis, on appelle ça ‘’T-shirt Gbagbo’’. Je ferai plaisir à des amis à Ouaga avec ça.»

Tout est dans la manière chez Ben. Nous nous disons au revoir à la porte du CFPJ ce jeudi après-midi et c’était pour moi bien difficile même si cela ne peut se remarquer sur mon visage, tellement je cache mes sentiments envers les autres.
Honnêtement, Ben m’a beaucoup marqué. Amicalement et humainement parlant. C’est un personnage dense, pas du tout complexe ni naïf, plutôt raisonnable avec un tout dans les muscles. D’ailleurs, il n’hésitait pas à menacer d’employer la force avec notre frangin Dou:
- «Quand le Koro n’est pas présent, c’est moi qui commande», lui disait-il, alors que j’étais bien là.
Je finissais toujours par voler au secours de Dou en disant:
- «Hé, Ben, c’est vrai que tu es mon adjoint mais je suis bien là et fais doucement avec Dou. Il suffit que tu lui tires l’oreille, il comprendra et vas-y doucement.»

Un conseil qui était destiné à le conserver au frais puisque ça ne dure jamais avec Ben. Lorsque je lui dis que j’ai un fils qui a l’âge de Dou, Ben me dit que lui aussi a un enfant mais encore en bas âge.
- «Donc tu étais marié, mon pote», lui ferai-je remarquer.

Ben s’arrête net et m’explique:
- «Non, je ne me suis jamais marié mais j’ai un fils, je le sais. Cela fait longtemps que je ne vois plus sa mère, mais il existe. C’est comme ça. N’est-ce pas que tu as compris. Mais si tu ne comprends pas, c’est pas grave, l’important est que tu sais maintenant que j’ai un fils.»

Je fais semblant d’avoir tout compris, étant donné que d’habitude, quand il fait l’intelligent, je lui montre tout de suite que je le suis et le comprends. Car je ne peux pas le décevoir en tant que son Koro et qu'il se confie très souvent à moi, comme lorsqu’il m’avouait que toutes les dix minutes, il faut qu’il vide sa vessie.
- «Tu ne sais pas c’est du à quoi ?» m’interroge-t-il.
Je le rassure:
- «Mais, mon ami, c'est parce que tu as de la santé et tu dois en être heureux. C’est quand on commence à vieillir que les médecins cherchent des défauts au niveau des reins, de la vessie, de la rate. A moins de quarante ans comme toi qui n'en a que 37, c’est le robinet qui est propre et qui libère vite l’eau.»

Le jeune Dou qui est au courant pour les va-et-vient de Ben aux toilettes, trouvera de quoi se venger et quand on devait sortir en reportage, il disait que Ben est dans son bureau pour faire allusion à son passage dans une toilette ou une vespasienne qu'il n'a pas manqué de tester.
(A suivre ...)

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