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vendredi 8 juillet 2011

Pourquoi à l'UPR, rien ne va plus ou presque ?

«Les prochains scrutins électoraux sont des rendez-vous essentiels pour le plus grand parti politique de Mauritanie. Notre parti se doit d’envoyer les meilleurs à l’Assemblée Nationale et dans les mairies des grandes villes», disait un membre de la commission politique de l’UPR en octobre dernier alors que le parti se préparait à dépêcher des missions à l’intérieur en prévision des législatives et des municipales de novembre prochain.

Facile à dire, difficile, très, très difficile à faire. Et pour cause ! L’on suivra par la suite, en décembre dernier, les moments difficiles et les difficultés énormes qu’avait vécus l’UPR pour remobiliser ses militants et sympathisants afin de célébrer la fin de la Gazra à Nouadhibou, où cette éclatante réalisation du président Mohamed Ould Abdel Aziz aurait pu donner à son parti un souffle nouveau et gommer la mauvaise réputation de vouloir «restituer les pratiques rétrogrades de l’ex PRDS» que nombre de stéphanois lui prêtent déjà Une réalisation qui s’ajoute au capital de confiance dont jouit le président Aziz mais que l’UPR n’a pas su mettre à profit comme bien d’autres de ses acquis.

Puis il y aura, en janvier 2011, le ras-le-bol des jeunes cadres du parti au Guidimakha où les déceptions ne faisaient que se multiplier encore en février dernier, pour dénoncer «l’interférence des politiques dans les affaires des populations».

Et comme un malheur ne vient jamais seul, il ne se passe pas une semaine, à Nouakchott, sans qu’une bagarre n’éclate entre «responsables» de l’UPR qui s’exprimant qui dans la presse, qui dans les réunions, qui de manière passive en évitant d’œuvrer pour le parti voire de s’y rendre tout simplement. Pire, on ne cesse de parler d’un UPR qui «se bouffe le nez» avec «des cadres compétents qui croient au projet de société du Président Mohamed Ould Abdel Aziz mais qui sont «ligotés» et mis en quarantaine par les «caïmans» qui font tout pour tenir éloigné le Président de la République de ses premiers soutiens.

Ainsi, lors de la réunion tenue dans la salle de projection du cinéma Galaxy, la plupart des intervenants indexeront le clan du premier vice-président Mohamed Yahya Ould Horma. Aux dernières nouvelles, le parti ADIL qui, en intégrant la Coalition des Partis de la Majorité (CPM) cherchait une relation, disait-il «équilibrée» avec le parti au Pouvoir, aurait décidé de geler ses rapports avec l’UPR.

L’ADJ/MR qui n’a pas été invité au festival des villes anciennes, à Chinguitti où tous les partis de la majorité présidentielle étaient représentés, semble également prendre ses distances avec cette coalition parce qu’elle est sous la botte de l’UPR.

L’UPR malade de son rang?
Comme quoi, non seulement le parti au pouvoir, ou le parti du président comme aiment à le présenter d’autres n’a pas réussi à décoller mais il devient un frein et un obstacle à l’élargissement de la majorité présidentielle et partant de la communauté des électeurs. Or, personne ne peut gouverner sans une formation politique sachant que, jouant un rôle de soutien et de médiatisation des relations entre les citoyens et la politique, le parti politique constitue «un apport indéniable à la démocratie».

Voilà pourquoi, au départ, soutenu dans son Mouvement de rectification par des élus et surtout par des initiatives privées, Mohamed Ould Abdel Aziz n’hésita pas à démissionner de sa fonction de président du Haut Conseil d’Etat pour créer un parti politique, participer, au nom de la majorité, aux négociations de Dakar et se porter candidat à l’élection présidentielle du 6 juin 2009. C’est ainsi que l’Union Pour la République (UPR), déjà en conception avancée, est créé le 5 mai 2009 pour l’élire à sa tête, président avant de le porter à cette présidentielle (reportée au 18 juillet 2009) qu’il remporte au premier tour.

Elu à la magistrature suprême, le président Ould Abdel Aziz démissionne alors de l’UPR le 2 août pour se conformer à la Constitution qui interdit le cumul de cette fonction avec celui président d’une formation politique et choisit un dirigeant pour le parti autour duquel un consensus semblait acquis.

L’homme réussit d’ailleurs à établir des ponts avec tout le monde et arrivait, tant bien que mal à avoir ce qu’il voulait de tous les groupes (parlementaires, initiatives, partis politiques, etc.). La mise en place d’une commission provisoire déclenchera bien des remous car elle ne convenait pas à tous parce qu’elle éliminait beaucoup de ces initiatives privées qui avaient farouchement soutenu et soutenaient toujours le président Aziz lequel finira par avouer que «des choix étaient objectifs et d’autres subjectifs».

Un premier congrès de toutes les surprises
Passée cette première secousse, une autre suivra quand commence les campagnes de sensibilisation et de mise en place des structures régionales alors que le parti ne faisait que commencer ses guéguerres intestines.

C’est la tenue du premier congrès qui fera l’effet de la goutte qui a fait déborder le vase, avec l’apparition d’un groupe dirigé par un chef qui n’avait pas fait partie de la fronde des parlementaires et qui n’avait jamais existé politiquement, si ce n’est qu’il était membre d’une tendance du Prds régulièrement battu aux municipales par Ould Moctar Salem dit Elken (l’ex-maire de Teyarett), ou qu’il avait été dans les rangs de la section du parti Baath (mouvement nationaliste arabe) en Mauritanie.

L’homme en question n’était autre que Mohamed Yahya Ould Horma, un douanier qui gravit les échelons jusqu’à être directeur général adjoint des Douanes puis directeur général des Impôts et que les mauritaniens découvriront, à la surprise générale, menant les négociations de l’Accord de Dakar en remplacement d’un Sid’Ahmed Ould Raiss pourtant plus diplomate et moins agressif.

Cette soudaine apparition au premier congrès de l’UPR allait tout changer pour cet homme que rien ne prédestinait vraiment à diriger un tel parti au pouvoir. Au fait, une commission de désignation des membres du Conseil National du parti sera constituée et comprenant outre le président du parti, Mohamed Yahya Ould Horma, Cheyakh Ould Ely (un autre baathiste), Me Aly Ould Mohamed Salem, et à quelque distance Mrabih Ould El Weli, Yahya Ould Abdel Ghahar, etc.)

Et comme il y avait beaucoup de nouveaux arrivants cooptés de l’opposition et qu’il fallait leur faire de la place, les couteaux furent taillés et la plupart des personnalités susceptibles d’être un obstacle pour le groupe, et en particulier celles des initiatives ayant constitué les premiers soutiens du président Aziz, seront éloignées du Conseil National.

Un sort que l’on fera subir, au sein du Bureau Exécutif, aux élus qui avaient apporté leur soutien au président Aziz (Sidi Mohamed Ould Maham, Mohamed Yahya Ould Kherchi, Bouya Ahmed Ould Chriv, Jemal Ould Yedali, etc.), comme pour s’accaparer les pouvoirs de cette instance en plus du rôle des conseillers.

Une mainmise sur l’UPR dont les conséquences premières seront que les instances du parti sont désormais constituées de gens peu connus et ne pouvant entamer des actions politiques (les activités des structures régionales du parti ne sont-elles pas réduites parce que sans moyens).

Tant et si bien que rien ne va plus à l’UPR ou presque et semble de plus en plus incapable d’apporter un «apport indéniable à la démocratie» et de jouer son rôle de soutien et de médiatisation des relations entre les citoyens et la politique, nombre de groupes le constituant commençant à s’entretuer pour exister, alors que la plupart des vrais soutiens du président Aziz préférant se tenir en dehors de ce qui se passe.

L’UPR navigue-t-il à contre courant?

Mais là où tout sonnait faux entre l’UPR et le président Aziz c’est lorsque ce dernier prenait le contrepied des déclarations des responsables de sa formations au sujet de l’opposition et/ou de l’amorce d’un dialogue. A telles enseignes que quelqu’un se demandera si «l’UPR était en phase avec Ould Abdel Aziz ou l’inverse?»

L’on se souvient en effet que malgré l’invitation au dialogue prônée par le Président de la république, expression faite à l’occasion du cinquantenaire de l’indépendance nationale («Nous exprimons, ici, notre entière disposition à engager un dialogue franc avec les partis de l’opposition, que nous invitons à participer de manière engagée à l’œuvre de construction nationale dans l’intérêt supérieur de la nation et pour la garantie d’un avenir radieux à notre peuple»), les déclaration des dirigeants de l’UPR, notamment les interviews et les interventions de son vice-président Mohamed Yahya Ould Horma dans les meetings, rompent avec la pratique politique, comme s’il ne cherche pas à apaiser le climat ou s’il manquait de style honorable pour communiquer avec ses adversaire politiques qu’il traitera de «résidus des régimes de la gabegie».

Car ce comportement qui donnait à chaque fois lieu à des critiques virulentes proférées par l’UPR à l’encontre de l’opposition, finira par agacer et une première réponse viendra du RFD qui dira: «le communiqué de l’UPR ne diffère pas des déclarations du sioniste Nétanyahou sinon que ce dernier est plus poli et plus sage. (…) «Celui qui lit leurs déclarations constate qu’ils sont stupides et lâches et arriérés et ne peuvent pas comprendre que l’Histoire ne pardonne pas et anéantit tous ceux qui s’opposent à elle.»

Pourtant le président Mohamed Ould Abdel Aziz, qui devra bien méditer le «Dieu préserve-moi de mes amis, mes ennemis je m’en charge», s’est une fois démarqué des déclarations des responsables de l’UPR quand il disait que l’opposition n’avait pas du tout tort de se prononcer sur les affaires du pays et faisait un travail constructif. Mais rien de plus et bien évidemment, nombre de responsables du parti au pouvoir ne l’entendent pas de la même oreille.

Certes, l’UPR a englouti, sans les ménager, ni les considérer à leur juste valeur, les soutiens, furent-ils partis ou mouvances ou initiatives politiques. Mais, à neuf (9) mois tout rond des prochaines élections municipales et législatives, les douleurs de la grossesse commencent déjà à se faire sentir et ces soutiens mis à mal risquent de se constituer en défense pour avoir une place au soleil en dehors du parti au pouvoir.

Une perturbation du climat politique qui frappera de plein fouet l’UPR, lequel, ne l’oublions pas «se doit d’envoyer les meilleurs à l’Assemblée Nationale et dans les mairies des grandes villes».

Aux yeux de nombre des jeunes et des cadres du parti, il revient aujourd’hui au président du parti qui jouit toujours de la même aura et du même consensus, de procéder rapidement à l’organisation d’un débat franc et constructif qui conduira à l’intégration de ces cadres dans les instances dirigeantes. Ce qui réduira le fossé qui se creuse de plus en plus chaque jour que Dieu fait, entre les uns et les autres. De même qu’il urge de s’ouvrir à l’opposition pour aider à l’instauration d’un véritable dialogue.

Mohamed Ould Khattatt (article publié in Nouakchott Info)

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