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lundi 18 février 2013

Gouvernement: Un déséquilibre régional inquiétant

Gouvernement: Un déséquilibre régional inquiétant Contrairement aux supputations sur un renouvellement total de l’équipe gouvernementale, il n’y aura eu, pour calmer les esprits, qu’un limogeage de deux ministres. Non seulement aucune explication officielle n’a été avancée, mais les deux ministres remerciés, même s’ils ne sont pas les meilleurs, n’étaient pas les plus mauvais et avaient en charge les deux départements qui touchent le plus directement la vie des gens, à savoir la Santé et l’Habitat. «Un non-remaniement» ou le «choix de la stabilité»? Et l’on doit à la vérité de dire que autant Ba Housseinou à la Santé qu’Ismail Ould Bedda Ould Cheikh Sidiya à l’Habitat, l’Urbanisme et de l’Aménagement du territoire, les deux hommes ont été des plus actifs. Le premier réalisant auparavant une politique de reboisement alors qu’il était à l’Environnement, avant d’être promu à la Santé où il n’a de cesse de s’efforcer de redynamiser le secteur avec un satisfécit et une bénédiction des partenaires concernés (OMS, UNFPA, UNICEF, BM, …) et le second restructurant des régions, éradiquant les kebbas à Nouadhibou, Nouakchott, Rosso, Akjoujt où des milliers de familles ont passé de longues années dans des «gazras» ne satisfaisant pas aux moindres normes de logement. Ould Bedda aura le mérite d’avoir laissé derrière lui, l’un des ministères les plus dynamiques au cours de ces trois dernières années, œuvrant à la maitrise du sol, à l’harmonisation des tissus urbains, à la gestion foncière transparente, à la modernisation de bâtiments administratifs, au développement des infrastructures et équipements publics et à la création de pôles de compétitivité et de délocalisation. Certes, le cas des deux enfants morts à R’Kiz des suites d’un vaccin inapproprié pour le Ministre sortant de la Santé et les foudres de beaucoup de gens pour lesquels il n’a pas accepté de faire des dérogations pour le Ministre congédié de l’Habitat, ont eu raison d’eux, mais combien sont les Ministres qui ne paient pas pour les erreurs dans leurs secteurs quand on sait que des prisonniers sont morts en détention, d’autres dans des mouvements de protestations, etc. Il ne s’agit pas ici de défendre tel ou tel ministre mais c’est dire combien les Ministres sont restés si longtemps qu’ils n’ont jamais payé pour ce qu’ils ont fait. Et c’est sans doute pourquoi, leur départ collectif a toujours été réclamé d’une part et d’autre part, c’est pourquoi l’opinion publique est en droit à présent de se demander le pourquoi du débauchage de ces deux ministres précisément. Ont-ils payé pour l’incurie de la majeure partie? Ont-ils été les premiers à partir, tels des meilleurs, pour dire aux autres que leurs jours sont, désormais, comptés? Ou tout simplement parce qu’on ne change pas une équipe qui perd. Des questions auxquelles il n’y a pas de réponse pour le moment. Mais au-delà de ce limogeage, qui peut s’inscrire dans un jeu de bluff rationnel s’insérant dans une stratégie globale que le président de la République, lequel fait face à une forte pression de ses deux oppositions, la CAP avec l’initiative de Messaoud et la COD avec son refus de lui parler, voire exige son départ du pouvoir, aura raffiné pour empêcher ses adversaires d’analyser de manière précise les lignes suivies, c’est surtout la composition déséquilibrée du gouvernement et du partage des fonctions assimilées, tant sur le plan régional que tribal qu’il faut voir. Pourtant dans toute démocratie, les équilibres régionaux, même en pratique informelle, sont pris en considération, puisqu’ils impliquent l’importance démographique, Et puisque nous avons ici carte blanche, allons au fond des choses. Partage des fonctions: Un casse-tête chinois ! En effet, les déséquilibres au niveau du partage des départements ministériels et des portefeuilles similaires, comme nous l’indique ci-dessous, est inquiétant avec des régions et des localités qui se taillent la part du lion alors que d’autres sont à peine ou pas représentées. Sans compter les postes de Conseillers du président de la République et du Premier Ministre, d’ambassadeurs ou de directeurs des établissements publics, présidents de Conseil d’administrations et autres services de sécurité, qui ne respectent aucun dosage régional. Ainsi, le Hodh Charghi compte sept (7) ministres dont le Premier Ministre sur lequel s’était porté le choix du Chef de l’Etat depuis ... le 6 août 2008, sans doute parce qu’ayant l’avantage d’être en dehors du jeu politique. Imposé lors des pourparlers de l’Accord de Dakar, il a été reconduit pour diriger le Gouvernement d’Union Nationale de Transition, puis maintenu à l’issue de la présidentielle de 2009 remportée par celui qui l’a toujours vu comme son ombre. Inamovible, l’homme reste là où il est, donnant à son Hodh Charghi le mérite d’avoir sept (7) autres portefeuilles dont six (6) assimilés au rang de Ministre (Président de l’Assemblée Nationale, Directeur de Cabinet du Président, Président du Conseil Constitutionnel, Haut Conseil de la Fatwa, Médiateur de la République et Commissariat à la sécurité Alimentaire) et un (1) haut poste (Président de l’Autorité des Transports). Soit au total 14 postes ministériels et/ou fonctions assimilées, rien que pour le Hodh Charghi. Bien évidemment, le Premier Ministre mérite cette confiance et il en a fait preuve en résistant (à la tentation du diable que lui a envoyé en mille messages la COD lors de la blessure et de la longue absence du président Aziz) et gardant la tête entre les deux épaules. «C’était trop beaucoup de bruit pour rien», peut-il aujourd’hui dire, avec un brin d’ironie. De même que dans ce Hodh Charghi au pouvoir, ce sont les villes de Néma et de Timbédra qui portent la couronne avec 4 ministres et 4 ambassadeurs, alors que la ville historique de Oualata, se lamente en orpheline, ne comptant personne nulle part. Autre Région qui rafle la mise, le Trarza avec quatre (4) ministres et deux fonctions assimilées (Président du Sénat et Président de la Cour Suprême). Mais le plus intriguant pour cette région dont les parents pauvres restent RKiz et Boutilimitt (qui ne compte aucun ministre alors qu’elle est la ville du Père de la Nation, mais aussi de l’actuel chef de file de l’opposition, Ahmed Ould Daddah), c’est que la représentation, dans le gouvernement, de la frange des Haratines, lui a été concédée, alors qu’ils sont ailleurs, notamment dans l’Est et dans le Nord du pays. Le Hodh Gharbi et le Gorgol se partagent la troisième place ex-aequo avec, chacun, cinq (5) postes dont trois (3) ministres et deux (2) portefeuilles au rang de ministre : pour le Gorgol : Cour des Comptes, Commission Nationale des Droits de l’Homme) et pour le Hodh Gharbi : Commissariat aux Droits de l’Homme, à l’Action Humanitaire et à la Société Civile et le Conseil du Prix Chinguitt. Au Hodh Gharbi, Koubenni et Tamchekett sont oubliées. Au Gorgol, Magham passe sous silence, après le décès de feu Ba MBaré et le limogeage de Ba Housseinou. Avec deux (2) ministres pour chacun, le Guidimakha, le Tagant et l’Adrar viennent en quatrième position. L’Adrar se réconfortera avec trois (3) autres fonctions au rang de Ministres (Conseil Economique et Social, Haute Cour de Justice et Autorité de Régulation), alors que le Tagant n’a qu’un (1) seul portefeuille assimilé (HAPA). Sélibaby, la capitale du Guidimakha, ne compte personne au gouvernement. Les départements du Tagant, à savoir Tidjikja et Tichitt sont le parent pauvre, alors que Moudjéria a eu droit à deux Ministres. Les Wilayas de l’Assaba, Brakna, l’Inchiri et Dakhlet-Nouadhibou quant à elles ne détiennent, chacune qu’un unique (1) poste ministériel. L’Assaba compte également un haut poste de fonction assimilée avec le Directeur Adjoint de Cabinet du Président de la République. Alors que Dakhlet-Nouadhibou, n’a que la directrice adjointe de Cabinet du Premier Ministre, le Brakna, lui, renferme le Directeur de cabinet du Premier Ministre et l’Administrateur-directeur général de la SNIM. Malgré cela, au Brakna, MBagne et Maghta-Lahjar sont jetées aux orties. Vient en lanterne, le Tiris Zemmour avec zéro (0) ministre et un (1) laborieux portefeuille au «rang de ministre» (Gouverneur de la BCM). Voilà un tableau qui parle de lui-même pour édifier les lecteurs et le décideur sur le déséquilibre régional inquiétant quand on sait que la politique de l’équilibre ou des quotas a toujours été érigée en règle d’or pour gouverner les Nations. Faut-il enfin, rappeler qu’en manœuvres politiques, c’est en temps de crise que les gouvernements sont changés pour détourner l’attention de l’opinion publique, entretenir l’incertitude des adversaires. Mohamed Ould Khattatt Répartition des postes de ministre et fonctions assimilées par région Hodh Chargui (14 postes) 1. Premier Ministre 2. Président de l'Assemblée Nationale 3. Ministre de la Justice 4. Ministre de la Santé 5. Ministre de l'Equipement et des Transports 6. Ministre de l'Hydraulique et de l'Assainissement 7. Ministre de la Culture de la jeunesse et des sports 8. Ministre de la Famille, de l'Enfance et des Affaires sociales 9. Directeur de Cabinet du Président de la République 10. Président du Conseil Constitutionnel 11. Médiateur de la République 12. Président du Haut Conseil de la Fatwa et de recours 13. Commissaire à la Sécurité Alimentaire 14. Président de l'Autorité de Régulation des Transports Terrestres Hodh Gharbi (5 postes) 1. Ministre de la Défense Nationale 2. Ministre de la Fonction Publique et de la Modernisation de l'Administration 3. Ministre du Pétrole, de l'Energie et des Mines 4. Commissaire aux Droits de l'Homme, à l'Action Humanitaire et à la Société Civile 5. Président du Conseil du Prix Chinguitt Assaba (2 postes) 1. Ministre délégué auprès du ministre d'Etat à l'Education nationale chargé de l'enseignement fondamental 2. Directeur Adjoint de Cabinet du Président de la République Brakna (3 postes) 1. Ministre des Finances 2. Directeur de Cabinet du Premier Ministre 3. L'Administrateur Directeur Général de la SNIM Gorgol (5 postes) 1. Ministre Secrétaire Général de la Présidence de la République 2. Ministre de l'Habitat, de l'Urbanisme et de l'Aménagement du Territoire 3. Ministre délégué auprès du Ministre d'Etat à l'Education Nationale chargé de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et des Technologies Nouvelles 4. Président de la Cour des Comptes 5. Président de la Commission Nationale de Droits de l'Homme Trarza (6 postes) 1. Président du Sénat par intérim 2. Ministre de l'Intérieur et de la Décentralisation 3. Ministre des Affaires Economiques et du Développement 4. Ministre du Commerce, de l'Industrie, de l'Artisanat et du Tourisme 5. Ministre délégué auprès du Ministre d'Etat à l'Education Nation chargé de l'Enseignement Secondaire 6. Président de la Cour Suprême Adrar (5 postes) 1. Ministre d'Etat à l'Education Nationale, à l'Enseignement supérieur et la Recherche Scientifique 2. Ministre des Pêches et de l'Economie Maritime 3. Président Haute Cour de Justice 4. Président Conseil Economique et Social 5. Président de l'Autorité de Régulation (ARE) D. Nouadhibou (2 postes) 1. Ministre de la Communication et des Relations avec le Parlement 2. Directrice Adjointe de Cabinet du Premier Ministre Tagant (3 postes) 1. Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération 2. Ministre du Développement Rural 3. Président de la Haute Autorité de la Presse et de l'Audiovisuel Guidimagha (2 postes) 1. Ministre délégué auprès du Premier Ministre chargé de l'Environnement et du Développement Durable 2. Secrétaire Général du Gouvernement Tiris Zemmour (1 poste) 1. Gouverneur de la BCM Inchiri (1 poste) 1. Ministre des Affaires Islamiques et de l'Enseignement Originel.

dimanche 19 février 2012

POTINS POLITIQUES

UMA (17 février 1989-17 février 2012): Au-delà des mots, les grands maux
Par Mohamed Ould Khattatt


On l’aura compris, les années passent et repassent sans rien changer ou presque dans la vie de l’UMA. Pourtant, le «Printemps arabe» qui est le fait des peuples et de leur ras-le-bol de certains de leurs dirigeants chassés en plein jour de leur fauteuil présidentiel, ne doit pas manquer de rappeler à ceux qui sont encore là et aux nouveaux venus qu’il faut dorénavant œuvrer pour plus de liberté, de démocratie, de développement. D’où l’impérieuse nécessité de redynamiser cet ensemble maghrébin limitrophe qu’est l’UMA. Un ensemble uni par des liens séculaires faits d’histoire, de géographie, de religion, de langue ...
Certes, les actuels chefs d’Etats de l’UMA, contexte régional et international oblige, le reconnaissent: la redynamisation de l’UMA revêt une dimension stratégique en rapport avec les repositionnements qui s’opèrent dans le monde. Mieux, ils ne cessent de multiplier les signes positifs: l’UMA est un «véritable moteur de l’unité arabe, un partenaire agissant de la coopération euro-méditerranéenne, un facteur de stabilisation et de sécurisation de la zone sahélo-saharienne, et un acteur structurant de l’intégration africaine, dira le roi Mohammed VI.

«La réalisation de l’unité maghrébine à l’ère des ensembles régionaux et internationaux est un impératif vital et pressant en vue de permettre à nos peuples frères de relever les défis, au sein d’un ensemble soudé et uni», renchérira le président algérien Abdel Aziz Bouteflikha.
«Nous estimons que le départ des dictateurs qui sévissaient en Tunisie et en Libye offre désormais au Maghreb Arabe les conditions psychologiques de sa remise en marche», affirmera le président tunisien Moncef Marzouki.
C’est donc stimulés par le vent de changement qui souffle sur la région que les chefs d’Etats de l’UMA semblent plus que jamais déterminés à aller de l’avant. Il faut bien l’espérer, maintenant que leurs chefs de la diplomatie se sont réunis hier samedi à Rabat pour redynamiser l’UMA et préparer un sommet des Chefs d’Etats que la Tunisie souhaite tenir chez elle cette année. Faut-il rappeler que les échanges commerciaux intermaghrébins représentaient en 2010 moins de 2% de l’ensemble de leurs échanges extérieurs, ce qui un des taux régionaux les plus bas du monde.

Si l’UMA m’était contée …
Le 17 février 1989, le traité constitutif de l’UMA est ratifié par les cinq Chefs d’Etat de l’Algérie, de la Libye, du Maroc, de la Mauritanie et de la Tunisie. C’était à l’époque: Chadli Benjedid, Mouammar Kadhafi, Hassan II, Maouwiya Ould Sid’Ahmed Ould Taya et Zein El Abidine Ben Ali.
Ce traité mettait en évidence les liens séculaires qui unissaient les différents peuples de ces pays limitrophes par leur histoire, leur géographie et leur religion, en plus de l’usage d’une même langue maternelle (l’Arabe). Un tas d’ingrédients qui suffisaient à convaincre les dirigeants maghrébins de la nécessité de créer cet ensemble fort d’une population de plus de 80 millions de consommateurs que l’Union européenne d’en face courtise déjà et que le reste du monde prendra, obligatoirement en compte. Mais vingt trois années plus tard, on en est encore à la case départ. Les mécanismes institutionnels de l’Union n’arrivent toujours pas à jouer pleinement leurs rôles, les aspirations des populations tardent à se concrétiser et l’intégration économique avance à peine.

Entre le rêve et la réalité
Autant dire que l’idée, vieille de plus de cinquante quatre années (la première tentative de création de l’UMA date de 1958 à Tanger, avant même l’indépendance de la majorité des pays maghrébins), semblait bien mûrie. La vérité est que l’euphorie et les optimismes affichaient ce 17 février 1989 cachaient mal les craintes que laissait deviner le problème du Sahara Occidental et le bras de fer de leadership algéro-marocain dans la région.
Pourtant, la volonté des cinq Chefs d’Etats était telle qu’ils se résignèrent, un moment, à donner la chance aux intérêts de leurs peuples au lieu de leurs propres calculs politiciens.
Ainsi, le gâteau des instances dirigeantes de l’Union est partagé: le Maroc se saisit du siège du secrétariat général, l’Algérie s’offre le Conseil de la Choura (ou Conseil consultatif), la Tunisie de la Banque centrale de l’UMA, la Libye du volet éducatif avec l’Université académique maghrébine et la Mauritanie de l’instance juridique maghrébine. Sur le papier, tout paraissait presque parfait. On entrevoyait une carte d’identité commune, une compagnie aérienne maghrébine, une route trans-maghrébine, etc.
La présidence de l’Union du Maghreb Arabe était tournante: elle revenait chaque année à l’un des cinq Chefs d’Etats. Seulement, depuis 1995, le rêve s’est assombri: le Maroc décide le gel de ses activités au sein des instances et structures de l’Union suite à un refroidissement de ses relations avec l’Algérie dont le mandat de la présidence expirait cette année pour échoir à la Libye. Mais la Jamahiriya rejette son tour présidentiel. D’un côté, parce qu’elle n’appréciait pas la politique de profil bas que ses pairs maghrébins pratiquaient alors qu’elle croulait sous un embargo que lui imposaient les Nations Unies et les USA dans le cadre de l’affaire de Lockerbie. De l’autre, parce qu’elle préféra chercher du côté de l’Afrique Noire pour briser son embargo et à être à l’origine d’une Union des Etats Unis de l’Afrique qu’elle sera la première à avoir lancé.

L’usure du temps
De la décision de ces deux pays, que sont le Maroc et la Libye, de reporter ce sommet des Chefs d’Etats, seule en pâtira l’UMA. Car depuis 1995, rien ne tournait rond et l’Algérie continuera d’assurer et d’assumer la présidence de l’Union, n’en pouvant, mais …
De tristes fêtes-anniversaires seront célébrées chaque année à travers les médias des pays de l’Union pour rappeler que l’UMA est peut-être cliniquement morte, mais que le cœur y est toujours.
Ce n’est qu’à la faveur des changements intervenus au Maroc et en Algérie (arrivée presque simultanée au pouvoir en 1999 de Mohamed VI et de Bouteflika), en plus de la levée onusienne de l’embargo sur la Libye et l’évolution positive du «Dossier Lockerbie», que les choses connaîtront, petit à petit un regain d’activité au sein des instances dirigeantes de l’UMA, européens et américains exprimant ouvertement le souhait de voir la coopération entre les pays du Maghreb Arabe se développer davantage pour permettre l’ouverture de la zone méditerranéenne aux échanges commerciaux qui pourront ainsi passer de 4 à 15%.
L’occasion aussi pour la nouvelle équipe algérienne de mettre les bouchées doubles pour se débarrasser de cette encombrante présidence de l’UMA et, c’est en marge du sommet France-Afrique de Yaoundé, au Cameroun, qu’il sera décidé de réunir les ministres des Affaires Etrangères des cinq pays membres à un sommet en mars 2001 à Alger. Cette réunion permettra de redynamiser les comités de suivi, notamment ceux des ressources hydrauliques, de la sécurité alimentaire, de la justice, etc.

L’épineuse question du Sahara Occidental
Mais, ce ne sera que partie remise en attendant un sommet des Chefs d’Etats qui fut proposé la même année mais qui n’aura pas lieu, de nouvelles donnes politiques relatives à la question du Sahara Occidental le tuant dans l’œuf avec la proposition en juin 2001, du Secrétaire général de l’ONU, d’un «accord-cadre» qui met entre parenthèses le référendum d’autodétermination auquel il substitut une autonomie interne. Ce qui, bien évidemment, est catégoriquement rejetée par le Front Polisario et l’Algérie qui le considèrent comme «un projet marocain».
Les rapports entre l’Algérie et le Maroc prennent un sérieux coup de froid, pour ne pas dire un coup de tonnerre puisqu’ils pousseront la surenchère de leur bras de fer jusqu’au paroxysme: côté Marocain, pour la première fois, un roi tient un conseil des ministres à Laayoune, la capitale du Sahara Occidental. Côté Algérien, pour la première fois, un président de la République entame une visite officielle en République Arabe Sahraouie Démocratique jusque dans les camps des réfugiés Sahraouis de Tindouf.
Alors que d’aucuns pensaient que les positions des deux pays sont irréconciliables, que le sommet des Chefs d’Etats n’était qu’une utopie et donc que la relance de l’UMA s’étirait vers l’infiniment petit, un apaisement des tensions entre l’Algérie et le Maroc est perçu en 2002 grâce notamment aux injonctions des différents partenaires de l’UMA.
Le 7ème sommet des cinq Chefs d’Etats est en principe acquis et ses préparatifs bien entamés mais, à la dernière minute, Libyens et Marocains déclineront l’invitation. Les premiers, jugeant le moment inopportun, les seconds prétextant que des divergences existent entre d’autres pays de l’UMA qui ne sont pas l’Algérie et le Maroc. Une allusion qui est faite au malentendu survenu entre la Mauritanie et la Libye suite à l’arrestation de Chbih Ould Cheikh Malainine, le président du Front Populaire, accusé d’intelligence avec le régime Libyen.
En réalité, les rapports entre les pays membres de l’Union du Maghreb Arabe ont toujours été le véritable obstacle qui se dresse devant la concrétisation de cet ensemble.
D’abord, parce que les textes et règlements intérieurs de l’UMA constituent, en eux-mêmes, un blocage des mécanismes institutionnels et opérationnels de l’Union du fait que toutes les décisions prises en conseil des ministres des Affaires Etrangères ou par toute autre instance restent soumises à une réunion des Chefs d’Etats de l’Union pour les entériner. En termes clairs, on a beau discuter, concevoir et développer, mais tant que les cinq Chefs d’Etats ne se sont pas réunis et approuvés unanimement c’est comme si de rien n’était. Comme quoi, chaque pays peut à lui seul bloquer l’UMA.
Ensuite, parce que les relations de «je t’aime, moi non plus» qu’entretiennent Marocains et Algériens sur la question du Sahara Occidental y sont pour beaucoup dans cette impossible construction de la «Maison Maghrébine» qu’est l’UMA.

La silhouette bon enfant mauritanienne

En Mauritanie, on a toujours privilégié une position de réconciliateur ou neutre quand il s’agit de différends entre les uns et les autres. En affichant une silhouette bon enfant, et distribuant des gestes de bonne volonté, de bon voisinage et de compréhension des situations ici et là, les Mauritaniens semblent prêts, à tout moment, à faire le grand saut vers l’Union sacrée.
Pourtant, ce sont parfois des positions difficiles à gérer. Mais la sagesse mauritanienne et son approche analytique des raisons des blocages et des problèmes qu’affronte l’UMA, à chaque tournant, l’ont souvent placé au-dessus de la mêlée. A cela s’ajoute un autre fait : la Mauritanie ne cesse de privilégier l’intégration économique maghrébine.
Si bien d’ailleurs qu’elle n’a pas hésité à filer l’amour parfait, tour à tour, avec la Tunisie en lui octroyant le premier réseau cellulaire GSM, puis le Maroc en lui cédant la Mauritel et l’Algérie en lui ouvrant ses profondeurs halieutiques et son marché d’hydrocarbures.

Quoi qu’il en soit, l’émergence d’un groupement régional fort permettra, en effet, à cet ensemble de se positionner en tant que partenaire incontournable et sérieux, pouvant apporter sa pierre à l’édifice pour gérer les problématiques mondiales et contribuer efficacement au maintien de l’équilibre planétaire et à la préservation de la paix et la sécurité dans le monde. La lutte contre le terrorisme en étroite collaboration avec les Etats du Sahel, le trafic de drogue, l’émigration clandestine et le renforcement de la libre circulation des personnes et des biens, s’annoncent dans ce contexte comme des défis majeurs à relever par l’UMA.
Mohamed Ould Khattatt

mardi 7 février 2012

POTINS POLITIQUES

Par Mohamed Ould Khattatt
Rébellion au Mali, troubles au Sénégal: “Mon Dieu gardez-moi de mes amis, …


La Mauritanie a certes mis en place un cordon sécuritaire pour repousser voire contenir AQMI en territoire malien. Elle a également démontré à ses partenaires qu'elle échappe aux troubles des "printemps arabes" en amorçant un dialogue politique national important entre son Pouvoir et un pan non négligeable de son opposition. Tout cela est bien heureux mais la vérité est que nous ne sommes toujours pas sortis de l'auberge, deux ans et cinq mois après le retour une vie démocratique "normalisée".

Trop de chats à fouetter
Non seulement, l’autre partie de l’opposition ne croise pas les bras et s’active à faire bouger les choses, visiblement à tout prix, quitte à allumer le feu d’une révolte populaire qu’elle veut pour renverser le régime. Mais les conditions de vie des citoyens pour ne pas dire économiques du pays, malgré l’apparente politique de bonne gouvernance, la lutte contre la gabegie ainsi que la générosité des bailleurs de fonds européens, ou encore les chiffres record de la SNIM et de la douane et autres programmes de Solidarité et d’Espoir pour tenter de parer au plus près, les conditions de vie des citoyens, disions-nous, sont si intenables à cause des successives hausses des prix des denrées de premières nécessités et de carburant, qu’elles n’arrangent absolument pas les autorités de Nouakchott, dans le contexte actuel de la crise dans l’euro zone fortement ressentie en Mauritanie et de la menace très sérieuse d’une crise alimentaire dans le Sahel touchant près d’un million de nos chers concitoyens.

Et comme un malheur ne vient jamais seul, ce lourd climat intérieur ne va pas sans quelques autres soucis propres à la politique politicienne chez nous -diabolisation de l’opposition radicale oblige !-, lesquels se traduisent par des manifestations estudiantines et des envolées dans l’hémicycle du parlement transformé en lieu de meeting par les opposants les plus durs quand il s’agit d’interpeller le gouvernement sur des sujets comme l’enrôlement des populations, l’application des résultats du dialogue.

L’enfer, c’est les autres?
Amère vérité. Mais tout cela est peut-être jouable pour le pouvoir du président Mohamed Ould Abdel Aziz dont la détermination dans la lutte contre le terrorisme prime sur l’idéal démocratique et parce que n’ayant pas peur de ses autres adversaires politiques depuis qu’il s’est fait rallier un Messaoud et un Boidiel qui ne juraient que par sa chute.

Seulement, ce qui n’est pas jouable et qui risque d’être une catastrophe sans précédent, c’est de ne pas considérer à leur juste valeur ce qui se passe aujourd’hui au Mali et au Sénégal, deux grands voisins de la Mauritanie dont les populations n’hésiteront pas et n’auront pas de soucier à se faire héberger chez nous, comme c’est déjà le cas avec ce millier de personnes qui ont quitté la ville de Léré (nord-ouest du Mali) pour se réfugier à Fassala.

Une véritable guerre qui a éclaté au Mali où le retour de centaines d’hommes armés de Libye, essentiellement des Touareg, a accéléré la reprise de la rébellion dans le nord-malien pourtant à l’arrêt depuis 2009. Et puisque les populations de la région du nord Mali, qui est une vaste région quasi-désertique difficile à contrôler et qui sert depuis plusieurs années de sanctuaire aux combattants d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), ne vivaient quasiment que des commerces de la ville de Léré laquelle a été vidée par les rebelles, les déplacements vers la Mauritanie, située à seulement une cinquantaine de kilomètres ne font que commencer.

Mais imaginons, à Dieu ne plaise, que le Sénégal où les heurts ont repris à Dakar et dans sa banlieue l’opposition appelant à la résistance, au lendemain de la validation de la candidature de Wade par le Conseil constitutionnel, les choses dérapent.

Cela est d’autant plus à craindre que la tension est montée d’un cran, que le discours des leaders du M23 s’est radicalisé avec l’appel «à la résistance active contre le coup d’Etat constitutionnel» d’Abdoulaye Wade.

C’est dire combien les autorités de Nouakchott, qui peuvent implorer le Ciel (Mon Dieu, gardez-moi de mes amis. Quant à mes ennemis, je m'en charge !"), ne doivent pas manquer d’anticiper la gestion de ces deux dossiers, en même temps qu’AQMI qui semble faire profil bas pour l’instant au Mali de crainte d’être accusée de soutenir les rebelles contre le régime finissant du président Toumani Touré. Pour combien de temps?
Mohamed Ould Khattatt

POTINS POLITIQUES

Par Mohamed Ould Khattatt
Nouakchott abrite une réunion des pays du champ: Evaluer la coordination militaire sur le terrain


Après les réunions d’Alger (en mars 2010) et de Bamako (en mai 2011), c’est au tour de Nouakchott d’accueillir, à partir du 23 janvier courant, les ministres des Affaires étrangères des pays du champ (Algérie, Mali, Mauritanie et Niger) auxquels s’ajoute le Nigeria, pour une rencontre de 48H.

En prélude à cette rencontre des ministres des Affaires étrangères et chefs de renseignements des pays du champ qui est élargie au Nigéria et au Burkina Faso, des experts civils et militaires des six pays auront entamé hier lundi, dans notre capitale, une réunion à huis clos sur la sécurité régionale, incluant la lutte contre les activités d’AQMI et du groupe islamiste nigérian Boko Haram.

Faire le point sur les liens entre Aqmi et Boko Harama
Et même si la réunion de Nouakchott aura à évaluer les conséquences de la crise en Libye sur les pays de la région, le degré de la menace terroriste et la stratégie régionale dans ses deux volets, sécurité et développement, force est de constater qu’elle aura forcément à se plancher sur la relation supposée entre les organisations terroristes Al-Qaïda Maghreb islamique (Aqmi) et Boko Haram qui est un groupe islamiste actif au Nigeria, pour faire une estimation des actions collectives concrètes à prévoir face à ce phénomène transfrontalier qu’est le terrorisme.

D’où la présence du Nigéria où est établie Boko Haram et dont l’implication dans ces concertations vise à permettre aux pays du champ d’établir une coordination afin de mieux lutter contre ces deux organisations terroristes, sachant que le partenariat entre les pays champ directement concernés par la lutte contre le terrorisme «commence à donner ses fruits», notamment au niveau du partage de renseignements, de la formation et de la logistique.

En d’autres termes, il s’agira donc de voir comment peut s’établir une coordination entre ce pays et ceux du champ se situant autour du nord du Mali où se trouve le «sanctuaire» des groupes terroristes.

De même que la rencontre de Nouakchott devra évaluer les visites effectuées à Washington et Bruxelles par les quatre ministres des Affaires étrangères des pays du champ, lesquels, visiblement, «insistent beaucoup» sur le thème de la sécurité, notamment le triptyque formation-logistique-partage des renseignements, non sans avoir oublié de sensibiliser leurs partenaires européens et américains sur le volet développement.

Asseoir une continuité à la stratégie
La Mauritanie qui assure le commandement du CEMOC (Comité d’état-major opérationnel conjoint, basé à Tamanrasset, en Algérie) aura, sans doute, à présenter un exposé sur la coordination militaire sur le terrain.
Un autre exposé sur la menace terroriste, celui-là, sera présenté à cette rencontre par l’Unité fusion et liaison (UFL), le mécanisme qui regroupe les chefs des services de renseignements des pays respectifs.

La rencontre de Nouakchott qui s’inscrit dans le cadre de la série de rencontres semestrielles envisagées par les ministres des Affaires étrangères des pays du champ sera aussi une opportunité pour lancer la réflexion autour de la Conférence «Alger 2» dont la tenue est prévue durant le premier trimestre 2012 à Bamako, pour asseoir une continuité à la stratégie conçue avec Américains et Européens, partenaires des pays du champ, maintenant qu’il est établi que les groupes de terroristes financent une bonne partie de leurs activités par l’argent des rançons et les revenus générés par des trafics en tous genres, particulièrement de drogue.
Mohamed Ould Khattatt

mardi 3 janvier 2012

POTINS POLITIQUES

Par Mohamed Ould Khattatt

3ème session ordinaire du Conseil national de l’UPR:
Faut-il recréer l’UPR?


Le palais des congrès de Nouakchott aura abrité jeudi dernier, 29 décembre 2011, la troisième session ordinaire du Conseil national de l’UPR. Et comme à son habitude, le parti au Pouvoir a fait les choses à sa manière plutôt «ostentatoire» où tous les barons du pays ou presque étaient présents, tout le gouvernement aussi à commencer par le Premier Ministre, Dr Moulaye Ould Mohamed Laghdaf, même s’il n’est finalement pas venu faire sa communication sur le thème «Le programme d’urgence Emel 2012», programmée immédiatement après le discours d’ouverture du président du parti et qui sera présentée par le ministre du Développement Rural, Brahim Ould M’Bareck.

Des divergences qui demeurent
Discours d’ouverture du président du parti Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Lemine, rapport intersession des activités du parti du Secrétaire Général, Oumar Ould Maatalla, note analytique sur la situation politique du pays présentée par le Secrétaire exécutif chargé de l’Orientation et des Affaires politiques du parti, Mohamed Mahmoud Ould Jaavar et même une motion de soutien au Président de la République saluant «la réussite du dialogue national», tout avait été prévu dans cette journée où l’UPR voulait d’abord montrer, à la veille des élections, son unité et prouver à qui en doutait que le parti primait, pour ses adhérents, sur les autres considérations. Mais alors pourquoi le Premier Ministre s’est-il absenté des réunions du Conseil national dont il est membres ? Est parce qu’il voulait éviter les critiques acerbes déroulées par certains cadres du parti contre le gouvernement et le parti au cours des séances à huis-clos ?
De l’intervention du président du parti, l’on retiendra surtout les quelques mots gentils à l’endroit de la presse indépendante (considérée comme «l’un des piliers sur lesquels repose une démocratie» et doit avoir «un soutien sans faille et un accès facile aux vraies sources de l’information»), pour gommer le «message négatif» que l’UPR a adressé à la presse indépendante, à la liberté de la presse en s’attaquant à notre agence ANI et celle d’Alakhbar et ANI» les accusant d’«évangélistes et sionistes se livrant à un travail obscur, au trafic d’influence, au clientélisme et du colportage de rumeurs». De même que le président du parti ne manquera pas de saluer les efforts des députés dans une tentative de dépasser le dernier clash entre le responsable politique et les députés auxquels il était venu faire la leçon.

L’UPR, trop malade?
C’est ainsi que le député de Barkéol, Mohamed Ould Babana, exprimera, lors de la séance à huis clos de jeudi, sa déception et son mécontentement par rapport à cette troisième session ordinaire du Conseil national de l’UPR en soulignant qu’il aurait été plus judicieux de mettre à profit ce conclave pour corriger les erreurs qui assaillent le parti depuis la récente désignation des responsables de ses instances dirigeantes à l’issu de son congrès.
Ould Babana qui avait saisi l’opportunité de la note analytique sur la situation politique du pays présentée par le Secrétaire exécutif chargé de l’Orientation et des Affaires politiques du parti, Mohamed Mahmoud Ould Jaavar, dira que ce dernier aurait du parler du «brouillard nocif et handicapant qui enveloppe les rapports du parti avec sa base, ses grands électeurs tant parlementaires que dignitaires et cadres» au lieu de s’en tenir au «brouillard nocif qui entoure les rapports du gouvernement avec le parti».
Le député de Barkéol relèvera que l’UPR a été incapable de préserver la cohésion et l’harmonie de la majorité qui a soutenu, avant et pendant l’élection présidentielle 2009, le président Mohamed Ould Abdel Aziz, laquelle majorité a fondé le parti et a réussi à faire adhérer la plupart des Mauritaniens, notamment l’élite, avant que le parti ne recule dans sa dynamique à cause de ses instances dirigeantes nommées par le congrès dernier alors que des voix s’étaient élevées pour exiger, dans les campagnes d’adhésion et lors des congrès, que soient respectés les critères de désignation graduelle prenant en considération l’ancienneté dans le parti, les qualifications académiques, l’aptitude à diriger et le poids électoral.
L’intervention du député Mohamed Ould Babana sera bien appréciée par la plupart des 14 membres du Conseil national qui prendront la parole et incitera le président du parti à lui répondre nommément. D’autres interventions critiquant les rapports du gouvernement avec le parti mais aussi les critères de désignation lorsqu’il s’agit de former des missions mettront à mal le président du parti Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Lemine qui avouera que le parti est confronté à certaines difficultés dans la formation de ces missions car il faut tenir compte des équilibres sociaux, en particulier «les femmes, les haratines et les jeunes».

Mais au-delà de ces fortes divergences, l’UPR s’est tout de même réunie comme pour dire qu’il est toujours le parti au Pouvoir et que, quoi que l’on en dise, il reste le seul appareil politique pour l’instant à même de réaliser le programme électoral du Président Ould Abdel Aziz. Certes, il est permis de rêver, de croire en quelque chose pour se consoler, mais attention au réveil …
Mohamed Ould Khattatt

dimanche 1 janvier 2012

POTINS POLITIQUES

Par Mohamed Ould Khattatt

Mettre en avant les valeurs démocratiques qui sont la liberté de pensée, de conscience et de religion

Le 23 octobre 2011, le peuple tunisien organisait et réussissait, pour la première fois de son histoire des élections libres, transparentes et démocratiques où le verdict des urnes donnait vainqueurs les islamistes, comme ce fut le cas au Maroc voisin et un accord de répartition des principaux postes à la tête de l’Etat fut signé entre partis laïcs associés et islamistes.

Non sans un bras de fer à distance opposant, devant le siège de l’Assemblée constituante, des milliers de manifestants islamistes à des modernistes-laïcs.

Un bras de fer qui faisait ressortir à la glauque lumière du jour, deux visions sociétales diamétralement opposées: celle des islamistes criant «Le peuple a fait son choix, laïcité dégage !» et celle des laïcs clamant «Non au salafisme synonyme de régression !»

Certes, il y eut plus de peur que de mal parce que l’on s’est vite rendu compte que cette polarisation est dangereuse pour un pays qui avait plus urgent et plus important à faire: former un gouvernement consensuel qui symboliserait cette maturité tunisienne qui a donné naissance au «Printemps arabe» en réussissant sa révolution. Un gouvernement qui prendrait à bras le corps les questions pressantes de l’emploi, de la pauvreté, de la paix, de la sécurité, bref les questions de développement économique, social et culturel d’une Tunisie qui sort d’une dictature qui n’avait que trop duré.

Et comme la démocratie est à la fois un idéal à poursuivre (visant essentiellement à préserver et promouvoir la dignité et les droits fondamentaux de l’individu) et un mode de gouvernement sans cesse perfectionné et toujours perfectible où est garantie la liberté de pensée, de conscience et de religion ou de conviction, il s’agit d’abord de protéger l’identité ethnique, culturelle, linguistique et religieuse des minorités nationales de sorte à ce que les personnes appartenant à ces minorités aient le droit de s’exprimer, de préserver et de développer cette identité sans aucune discrimination. Voilà qui convainc sans doute les uns et les autres de surmonter l’épreuve.

Mais les événements graves par lesquels est passée la Tunisie nous interpellent à plus d’un titre, au Maghreb et au Machrek, pour ouvrir les yeux sur la multiplicité de l’islamisme politique, ce grand bénéficiaire des «printemps arabes», afin d’éviter que ses groupes réactionnaires et fondamentalistes, dans nos pays respectifs du Maghreb arabe -et Dieu sait qu’il y en a !- ne s’emparent de la scène politique pour instaurer un régime attentatoire aux libertés individuelles et/ou imposer leurs visées obscurantistes.

Ce qui est tout le contraire d’un Etat démocratique où il y a un véritable partenariat entre hommes et femmes dans la conduite des affaires publiques, où hommes et femmes agissent dans l’égalité et la complémentarité, s’enrichissant mutuellement de leurs différences.

Reste à espérer que dans ces démocraties en construction en Tunisie, en Libye, en Egypte (le Maroc a une plus longue tradition dans la démocratie et s’est imposé comme un modèle en matière de coexistence avec les Islamistes puisque son Roi a toléré les partis islamistes au moment où ils étaient interdits dans les pays arabes avant de leur concéder de diriger le gouvernement), les partis islamistes puissants et les forces démocrates plus modernistes, majoritaires mais divisées, sauront chasser, après les dictateurs, les terroristes islamistes.
Mohamed Ould Khattatt

POTINS POLITIQUES

Par Mohamed Ould Khattatt

Printemps arabe et UMA: Ces islamistes qui, désormais, gouvernent …

Dans un article publié par le journal «Le Monde» en date du 16 décembre courant, sous le titre «Les islamistes au défi du pouvoir» (lire P.5), l’on pouvait lire: «Les élections égyptiennes, marocaines et tunisiennes l’ont confirmé en moins de deux mois: l’islamisme politique est à cette étape le grand bénéficiaire des "printemps arabes".» Ce qui est incontestable même si, dans chacun des pays où les islamistes ont accédé au pouvoir en dirigeant déjà les gouvernements grâce à leurs résultats électoraux, les choses se sont passées d’une manière différente, l’islamisme politique, ici ou là, ne répondant pas aux mêmes règles de jeu.

Bien évidemment Hamadi Jebali, du parti tunisien Ennahda, n’est pas Essam Al-Arian, figure de la confrérie des Frères musulmans égyptiens et Abdelilah Benkirane, le secrétaire général du PJD marocain n’est ni l’un ni l’autre.
Pourtant la solidarité est fort affichée entre tous comme si ce seront à l’avenir les mêmes modes de gouvernement qui seront établis dans un pays comme dans l’autre.

D’ailleurs, Gilles Paris, l’auteur de l’article en question ne s’empêchera pas de conclure en se posant bien des interrogations: «Le bilan de ces expériences ne pourra certainement pas être dressé en toute connaissance de cause avant longtemps. Mais il y a tout lieu de croire que les victoires électorales sont le prélude à de douloureuses remises en cause. Comment s’accommoder du pluralisme ? Que faire de la liberté de conscience, des minorités ? C’est à l’aune de leurs réponses que les nouveaux pouvoirs pourront être jugés.»

Voilà peut-être pourquoi, à peine élu, le président tunisien, Moncef Marzouki dont le Premier ministre n’est autre que le numéro 2 du parti islamiste Ennahda, a tenu à ce que son premier contact avec un chef d’Etat étranger, soit avec le souverain marocain Mohammed VI. Une décision porteuse de bien des significations et des messages, sachant que Moncef Marzouki est considéré, non seulement comme un militant démocrate et moderniste mais et surtout une des icônes du Printemps arabe qui a laissé son empreinte intellectuelle et politique sur la révolution tunisienne.

Et comme le nouveau président tunisien sait que le Maroc a une longue tradition dans la démocratie, (le royaume a banni le parti unique depuis l’Indépendance pour laisser place au multipartisme), et s’est imposé comme un modèle notamment en matière de coexistence avec les Islamistes (le Roi a toléré les partis islamistes au moment où ils étaient interdits dans les pays arabes), alors que lui-même Moncef Marzouki et sa tendance politique sont dans une posture de coexistence et de collaboration avec Ennahda, il fallait entamer sa présidence par un geste fort: reconnaître et renforcer le rôle central du Maroc dans le monde arabe post-révolutions. Voire concéder, sur le plan géopolitique, au Maroc, la place de leader, ne serait-ce que symbolique, de ce groupe Tunisie-Lybie-Egypte où les islamistes ont enfin pu «convertir en pourcentages et en sièges» des décennies de lutte opiniâtre.

Cela d’autant plus que le Roi du Maroc a accepté d’enterrer «la monarchie exécutive», sans coup de feu ni soulèvements des masses mais avec une réforme constitutionnelle qui consacre le suffrage universel comme unique source de pouvoir et de légitimité de celui-ci et garde au roi son rôle d’incarnation de la nation et de chef religieux. Une exception marocaine qui, du coup, propose un vrai modèle car, ici, le Roi a su élargir les champs de libertés, renforcer les institutions et respecter les résultats du suffrage universel.

C’est dire que les deux chefs d’Etats auront beaucoup d’intérêt à échanger leurs expériences, se congratuler et s’afficher à l’aise dans cette nouvelle situation de bouleversement géopolitique qui n’est pas de nature à plaire à d’autres pays de l’Union du Maghreb, dont déjà trois pays sur cinq (Libye, Maroc Tunisie) sont gouvernés par des islamistes.
Mohamed Ould Khattatt